La Chevêche d’Athéna, une espèce emblématique…

Avec la taille d’un merle et le poids d’une pomme – 160g en moyenne – la Chevêche d’Athéna compte parmi les rapaces nocturnes les plus petits de France. Son aire de répartition s’étend de l’Europe occidentale à l’Asie centrale avec l’essentiel de ses effectifs situés sur le pourtour méditerranéen. Emblème de la Déesse de la sagesse Athéna dans la Grèce antique, la Chevêche fait partie des espèces qui symbolisent de nos jours le déclin de la biodiversité dans les milieux agricoles.

… et indicatrice des milieux agricoles

Le maintien de cette chouette dans les agrosystèmes est étroitement lié à celui de nombreuses autres espèces qui constituent la base de son régime alimentaire : invertébrés (orthoptères, coléoptères…) et vertébrés (rongeurs, petits passereaux et reptiles). La Chevêche est un indicateur de biodiversité en même temps qu’un auxiliaire de culture : sa première proie vertébrée en Provence est le campagnol.
Les éléments constitutifs du paysage sont également primordiaux pour cette espèce, autant d’un point de vue alimentaire (importance des haies, des zones herbacées, des murets de pierres sèches abritant ses proies) que reproductif (nécessité des vieux arbres ou du petit bâti rural pour cette espèce qui niche dans des cavités). La Chevêche est un indicateur de la qualité des paysages ruraux.

Une remarquable capacité d’adaptation

Les cabanons agricoles : un fort enjeu de conservation pour la Chevêche en Provence
La Chevêche a su s’adapter à une grande diversité de paysages agricoles façonnés de longue date par la polyculture et l’élevage. En Provence son habitat se compose le plus souvent de prairies, de vergers et de vignobles ; elle est également présente jusqu’en périphérie immédiate des villages et des hameaux. Pour nicher, l’espèce reste étroitement tributaire de la présence de cavités offertes le plus souvent par les vieux arbres (mûriers, saules) ou certains bâtiments (cabanons agricoles ou vieilles bâtisses).
Ce petit rapace strictement sédentaire reste cantonné à son territoire toute l’année et les couples une fois formés restent fidèles tout au long de leur vie.

L’observatoire régional de la Chevêche d’Athéna

Le réseau des espaces naturels se mobilise

Les Parcs naturels régionaux des Alpilles, du Luberon, du Mont-Ventoux et du Verdon ainsi que le Grand Site de la Sainte-Victoire ont inscrit au cœur de leurs projets de territoire la conservation du patrimoine naturel et le maintien de la qualité des paysages ruraux. Ils se mobilisent en faveur de la Chevêche pour en faire un indicateur de l’évolution des milieux agricoles. L’objectif de l’observatoire vise à recenser l’espèce par la mise en place d’un suivi régulier pour éviter qu’une diminution généralisée des effectifs ait autrement toutes les chances de passer inaperçue. Les inventaires ont été réalisés par des observateurs bénévoles ou professionnels, coordonnés par la LPO PACA. Les résultats de cette enquête réalisée tous les 4 ans sont intégrés dans le calcul de l’Indice Région Vivante (Observatoire régional de la Biodiversité).

Une méthode commune de recensement des mâles chanteurs

Spontanément, la Chouette Chevêche chante peu, surtout si la densité d’oiseaux est faible. On utilise pour cette raison la méthode de la « repasse » qui consiste à diffuser, en période de reproduction (mars-avril), le chant territorial du mâle à l’aide d’un magnétophone. Si cette méthode a montré son efficacité – elle permet de repérer plus de 80% des individus présents – cette situation artificielle peut perturber temporairement l’oiseau. Elle doit être encadrée et utilisée avec beaucoup de précautions. Sur près de 1600 points d’écoute réalisés au dernier recensement régional (2020-21) plus de la moitié ont été réalisés dans les secteurs agricoles des territoires concernés (PNR & Grand Site) mobilisant au total 164 participants.

Les résultats globaux de l’étude (2020 – 2021)

  • 902 points d’écoute réalisés en 2020-2021 sur 106 communes ;
  • la présence de la Chevêche est confirmée sur 71 communes ;
  • 434 mâles chanteurs recensés (621 individus contactés au total) : c’est près d’un tiers des effectifs régionaux estimés pour cette espèce ;
  • densité moyenne calculée = 0,48 mâle/km².

Territoire Mâle chanteur
Parc naturel régional des Alpilles 48
Réserve de biosphère Luberon Lure 273
Parc naturel régional du Mont-Ventoux 71
Parc naturel régional de la Sainte-Baume 12
Parc naturel régional du Verdon 13
Grand Site Sainte-Victoire 17
TOTAL 434

La tendance des effectifs de mâles chanteurs entre les périodes 2012-2013 et 2020-2021 * est de -24%

*tendance calculée sur les 731 points identiques réalisés aux 2 périodes.

Le contexte régional et les menaces

La Chevêche se rencontre dans les six départements de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur avec une répartition des effectifs concentrée toutefois dans les plaines agricoles du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône. Elle est absente des massifs alpins et des grandes étendues boisées. L’effectif régional est estimé à 1 500 mâles chanteurs. Étroitement lié aux activités humaines, l’avenir de cette espèce est à considérer au regard des principales menaces qui pèsent sur elle :

  • la destruction directe et la fragmentation de son habitat (chaque année en région Paca, 3 500 ha de terres agricoles retournent progressivement à la forêt et 3 000 autres sont grignotés par l’urbanisation) ;
  • l’intensification des pratiques agricoles (produits phytosanitaires, arrachage de haies et de vieux arbres) ;
  • la rénovation du bâti rural ancien (il faut encourager les propriétaires à conserver une cavité discrète ou à placer un nichoir de remplacement pouvant permettre à la Chevêche de se reproduire).

Le statut de conservation de cette espèce s’est vu détérioré dans le cadre l’élaboration de la dernière liste rouge des oiseaux nicheurs de Provence-Alpes-Côte d’Azur (2020) ; elle est maintenant classée dans la catégorie « Quasi-menacée » et fait toujours l’objet d’un Plan d’actions régional coordonné par la LPO PACA avec le soutien financier de la DREAL. Ce plan repose sur les axes suivants :

  • l’étude et le suivi des populations ;
  • la protection de l’habitat (pérennisation des cavités de reproduction par la pose de nichoirs) ;
  • l’information et la sensibilisation des publics.

Crédit images: ©LPO – Martin Steenhaut, ©LPO – Olivier HAMEAU, ©Grand Site Sainte-Victoire.